Login

Vu à Chypre Quand l’huile d’olive fait rayonner le savoir-faire local à l’export

De très nombreuses petites exploitations parsèment ce pays typique du climat méditerranéen, où les oliveraies tiennent une place prépondérante.

La qualité de l’huile d’olive chypriote est reconnue mondialement. De nombreuses petites entreprises, tel le moulin Eleotrivia Karagiorgi, en profitent pour valoriser cette image de marque en travaillant à façon.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

C’est l’un des pays européens les plus discrets. Située au sud de la Turquie et à quelques kilomètres du Liban, la République de Chypre a une position stratégique fondamentale, au carrefour de l’Europe, du Moyen-Orient, et de l’Asie. Pleinement intégrée à l’Union européenne depuis 2004, elle ne contrôle en pratique que 60 % de l’île, le versant nord-est étant sous domination turque.

On aurait tort de réduire Chypre au tourisme, l’agriculture y est une priorité. Certes, elle ne représente que 3 % du PIB, mais réunit plus de 10 % des emplois, avec comme productions principales un peu de céréales, surtout des agrumes, de la viticulture et des olives.

Une pléiade d’acteurs

Les olives sont cultivées depuis des siècles et occupent une part significative de la superficie agricole. C’est, par excellence, la culture traditionnelle dans ce pays typique du climat méditerranéen, où les oliviers, partie intégrante de l’héritage chypriote, sont protégés par la loi, qui interdit tout abattage, sauf en cas de nécessité absolue. 19 000 producteurs actifs y sont recensés, avec des surfaces moyennes de 2 à 3 hectares. Il y a très peu de grandes exploitations. La production nationale atteint environ 60 000 t/an, dont 30 % part à la fabrication d’huile.

40 % de l'huile part directement chez les habitants ou les restaurateurs qui viennent la chercher avec des jerricans. Les 60 % restant sont exportés puis vendus sous marques de distributeur. (© C. DEQUIDT)

Le réseau de distribution et les huileries sont elles aussi très atomisées. Les olives sont pressées dans des moulins mécaniques pour en extraire l’huile, très réputée du fait de sa qualité exceptionnelle et de son goût distinctif. Elle est exportée dans de nombreux pays, notamment en Europe et en Asie. La production annuelle d’huile est ainsi passée de 6 800 t il y a vingt ans à plus de 10 000 t aujourd’hui.

Les olives pressées sont toutes issues d'une agriculture raisonnée, au cahier des charges strict. (© C. DEQUIDT)

Un réseau de distributeurs

Pambos Karagiorgi est le directeur du moulin Eleotrivia Karagiorgi. Son entreprise privée, proche de Larnaca, travaille avec 3 000 producteurs pour 800 t/an d’huile en moyenne. « À Chypre, les olives sont commercialisées majoritairement brutes pour la consommation des ménages et la cuisine. Le reste devient de l’huile, dans des petites unités de fabrication comme la nôtre, précise-t-il. Nous n’avons pas besoin de faire du marketing, l’entreprise n’a pas de marque propre. 40 % de notre huile part directement chez les habitants ou les restaurateurs qui viennent la chercher dans des jerricans. Pour les 60 % restants, pas de site internet mais un excellent réseau de distributeurs et de négoces internationaux, avec qui nous développons leur marque propre que ce soit en épicerie fine ou en grande distribution. Seule l’origine apparaît sur l’étiquette. »

Pambos Karaglorgi, directeur du moulin Eleotrivia Karagiorgi, travaille avec 3 000 producteurs pour 800 t/an d’huile en moyenne. (© C. DEQUIDT)

Cette confiance a amené l’entreprise non pas vers le bio, mais vers une agriculture raisonnée. « Comme partout en Europe, les oliviers sont soumis à des attaques de maladie qui nécessitent des traitements. Nous avons un cahier des charges très strict avec nos acheteurs pour leur fournir une huile qu’ils pourront vendre avec des appellations du type vierge, issue de pratiques durables. Nous respectons pleinement les lois de durabilité agricole de l’Union européenne. »

Une filière agrumes très organisée

Chypre, c’est aussi une filière agrumes (citrons, pamplemousses, mandarines et oranges) organisée avec méthode et persévérance, notamment dans la région de Limassol, au sud de l’île. Le pays reste le cinquième producteur de l’Union européenne, même si la production totale est en recul : 60 000 tonnes en 2024 contre plus de 100 000 tonnes dix ans plus tôt.

Créée en 1964, Sedigep, une union de coopératives spécialisée dans la production d’agrumes, exporte 100 % de sa production sous marques de distributeurs ou avec ses propres marques, Cyprina, Cyprofresh et Tango. « Nous gérons plus de 30 % de l’exportation globale de l’île en agrumes, pommes de terre et grenades. Mais nos exportations ont chuté depuis 2005. Cette baisse est régulière car la concurrence est plus exacerbée et le climat de plus en plus chaud et sec », souligne le président de Sedigep.

Pourtant, la grande majorité des 1 100 ha de vergers sont irrigués. Et on y trouve des techniques et des installations de premier ordre. « Sur ce plan, c’est essentiellement avec la Grèce que nous travaillons, mais nous sommes ouverts à des partenariats avec d’autres pays comme la France ou le Benelux. » Les 500 producteurs adhérents sont tous certifiés GlobalGap, et Sedigep utilise un système de mutualisation pour déterminer le paiement final du producteur. Ses principales usines de conditionnement d’agrumes et de grenades sont proches de Limassol et Paphos, tandis que les pommes de terre sont conditionnées à Vrysoules. Une centaine de containers est expédiée chaque année dans 26 pays en Europe (Grèce, Belgique, Allemagne, Angleterre), au Canada et en Asie. L’entreprise, qui emploie 35 permanents et 300 saisonniers, est d’ailleurs à la recherche de nouveaux projets pour relancer ses marchés à l’exportation.

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement